samedi 23 novembre 2013

Théâtre jeune public: Trois questions à... Martin Bellemare

Trois questions à... est une série qui permet de découvrir, en trois questions, des spectacles d'artistes et d'artisans du théâtre et de la danse qui aiment leur métier et le pratique au quotidien.

Par Robert Boisclair

Martin Bellemare est l'auteur de la pièce Un château sur le dos présentée aux Gros Becs du 3 au 8 décembre.  Les Enfants du paradis lui posent trois questions au sujet de ce spectacle.

1) Les Enfants du paradisUn château sur le dos est inspiré d'une anecdote historique rapportée par Michel de Montaigne dans un de ses essais. Comment avez-vous décidé d'aborder cette anecdote historique ?

Martin Bellemare: Si la question porte sur la genèse du projet, voici : en lisant le premier Essai de Montaigne, j'avais lu cette anecdote, rapportée par le philosophe, qui m'avait frappée et que j'avais trouvé très forte.  Je l'avais rapportée à mon tour à Marie-Ève, de Théâtre Ébouriffé. Quelques semaines plus tard, elle m'est revenue, portant encore en elle cette anecdote, comme moi d'ailleurs, et m'a encouragé à écrire à partir de ça.

Si la question porte sur la façon que j'ai choisie de traiter cette anecdote, voici : il s'agit d'une anecdote historique du XIIe siècle.  Je me suis demandé si je devais la transposer à une autre époque.  Je me suis demandé pourquoi priver le jeune public d’une dimension historique.  Cette anecdote me semblait porter quelque chose de grand et d’intemporel qui méritait d’être préservé.  Elle me donnait envie de raconter quelque chose d’épique.  En fait, n’importe quel contexte de guerre pouvait accueillir le contenu de l’histoire que j’imaginais.  J'ai donc choisi de donner à la pièce une sorte d'intemporalité en préservant une teneur historique.  

2) Les Enfants du paradis: Les pièces pour le jeune public sont souvent proches de son quotidien.  Aviez-vous peur d'aller à contre-courant en explorant un genre qu'il connaît moins ?

Martin Bellemare: Je suis passé par plusieurs étapes de réflexion avant de comprendre et de convenir que cette teneur "historique" allait peut-être à contre-courant.  J'avais effectivement observé le fait que le contenu des pièces jeune public portait plus souvent qu'autrement sur des éléments de son quotidien.  Mais je n'avais pas noté l'absence relative de références au passé, ou enfin à d'autres époques.  Je comprenais qu’il soit nécessaire de parler du monde actuel au jeune public.   J'ai pensé à l'importance de la diversité des spectacles auxquels nous convions les spectateurs.  Pour nous, public adulte, le répertoire historique tient presque de l’acquis, mais pour le jeune public, qui se succède et restera toujours jeune, ce territoire est peut-être à découvrir et à approfondir. Pourtant son intérêt pour le passé est manifeste.  Il aime les dragons, les princesses, les dinosaures, les chevaliers, tout cela qui meuble de façon naturelle ses histoires inventées et son espace de rêve et d’imaginaire.  Au théâtre de tenter de dépasser les stéréotypes et de lui présenter le passé dans sa profondeur humaine.

3) Les Enfants du paradis: Avez-vous été tenté d'actualiser l'anecdote historique ?

Martin Bellemare: Dans un certain sens, l'anecdote a été actualisée.  Un château sur le dos est un texte de notre époque puisqu’il a été justement écrit à notre époque.  Il n’est pas érigé uniquement sur de la modernité et de l’actualité, mais il porte inévitablement ces données en lui, dans sa façon dont l’histoire est organisée à des fins de tension et d’efficacité, dans sa façon de s’adresser au public, dans sa façon d’illustrer des situations humaines qui ne sont pas caractéristiques d’une seule époque.  De plus, la mise en scène de la pièce profite des ressources techniques d’aujourd’hui et vise évidemment à capter l'attention du spectateur de façon moderne puisque c’est au public d’aujourd’hui que la pièce s’adresse.

La pièce propose un dépaysement au niveau temporel en souhaitant amener le jeune spectateur d'aujourd'hui à se concevoir aujourd'hui dans une bande du temps plus large que le présent à tout prix.  En ce qui concerne les questions morales soulevées par la pièce, elles ne sont pas si différentes après tout de celles que les jeunes se posent dans la vie de tous les jours.  Les thèmes abordés, le courage et la loyauté, ont déjà eu des moments forts dans l’histoire, et pour la raison qu’ils sont restés dans la mémoire, ces moments démontrent qu’il est encore possible d’agir ainsi, que le présent est aussi une histoire qui s’écrit.

Bon théâtre et bonne danse !

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