vendredi 10 octobre 2014

Gros-Câlin: tendre étreinte

À Premier acte, et dans le cadre de Québec en toutes lettres, Gros-Câlin ou la conférence sur la solitude des pythons dans les grandes villes est une histoire de mue et d'amour offerte au public pour encore quelques jours.

Une critique de Robert Boisclair


Gros-Câlin, c'est le nom que donne Michel Cousin, modeste employé célibataire, il est statisticien de son métier, au python qu'il a rapporté d'Afrique. Il fantasme ses rapports avec Mademoiselle Dreyfus, collègue de travail d'origine guyanaise, et va aux «bonnes putes». Il a besoin d'amour. Et il en donne beaucoup. Au python surtout. Qui lui donne du réconfort. Il ne s'en séparera que lorsqu'il se prendra pour lui. Le reptile mue. Michel Cousin également.

On y parle de solitude et de désarroi bien sûr. Michel Cousin n'est pas comme tout le monde et il le ressent tragiquement. D'où ce refuge dans la rêverie et les fantasmes. Mais le sujet fondamental de cette pièce, c'est l'amour. Ce besoin irrépressible d'aimer et d'être aimé. Que l'on soit comme tout le monde ou si différent. Romain Gary, pardon Émile Ajar, le décline sous toutes ses formes tout au long de la pièce, jusqu'à cette mue où Michel Cousin devient python. Car pour aimer ne faut-il pas d'abord s'aimer soi-même?

Pascal Contamine, seul sur scène et au milieu d'un décor mi-appartement, mi-vivarium, invite le spectateur dans l'univers et les réflexions atypiques de Michel Cousin avec une magistrale maîtrise du rythme. Une personnage étonnant que Contamine interprète avec brio. Il offre les mots de Gary/Ajar comme jamais on ne les a entendus. Il danse avec les mots. Tout coule, glisse à merveille.

Il faut dire que le texte de Gary/Ajar est savoureux à la base. Les emplois étranges, l'humour, la poésie du texte ne jugent jamais le personnage singulier qu'il offre. Au contraire. Il dresse un portrait sans jugement de cet être si différent. Au spectateur de se faire sa propre idée.

Un spectacle à voir pour un comédien qui maîtrise son art, un texte qui fait réfléchir et, ma foi, pour s'offrir une bonne dose d'amour.

En représentation au Périscope jusqu'au 11 octobre. Avec et dans une mise en scène de Pascal Contamine. Un texte de Romain Gary/Émile Ajar. Une adaptation de Pascal Contamine.

Apprenez en plus sur ce spectacle en écoutant notre interview avec Pascal Contamine (vers la vingtième minute de l'émission du 29 septembre).

Bon théâtre et bonne danse !

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