vendredi 6 novembre 2015

1984: orwellien

Le 1984 du Trident propose un «pire des mondes» bien orwellien. Les costumes, l'environnement sonore, l'esthétique de la pièce, les décors qu'il donne à voir, les captations vidéos, contribuent à l'étouffement et à la création de ce futur frigorifiant qu'a imaginé l'auteur Georges Orwell dans le roman éponyme.

Une critique de Robert Boisclair

En répétition
Crédit photo: Hélène Bouffard

La pièce débute par un club de lecture qui, bien longtemps après l'année 1984, discute de l'oeuvre. Puis tout d'un coup, incursion en l'année 1984 dans l'univers de Winston Smith (Maxim Gaudette) qui travaille aux Archives du Ministère de la Vérité. Il est amoureux de Julia (Claudiane Ruelland) avec laquelle il fait l'amour dans une chambre qui, miraculeusement, est à l'abri des écrans de surveillance. Il est contacté par O'Brien (Alexis Martin), membre d'une société secrète qui tente de faire tomber le parti. Mais c'est un piège. Dénoncé, Winston est torturé et rééduqué.

Orwellien
Belle réussite d'Édith Patenaude et son équipe dans la création de cet univers oppressant où la liberté n'existe plus et où la langue est normalisée, détournée de sa fonction première au bénéfice d'un État totalitaire qui ne cherche qu'à formater la pensée. Les costumes gris, le décor épuré aux airs cataclysmiques, l'écran de surveillance géant qui trône au centre de la scène, l'éclairage généralement sombre mais intense lors des interrogatoires, tout contribue à créer l'ambiance étouffante du «pire des mondes».

L'utilisation d'une caméra qui recrache sur un écran géant les expressions les plus fines des comédiens est une très belle trouvaille. Cela ajoute à l'ambiance oppressante, à cette présence constante d'un «Big Brother» qui observe les moindres gestes des citoyens.

Une adaptation troublante qui démontre que les intuitions de George Orwell étaient justes. Si notre monde n'est pas celui de 1984, il s'y approche, à certains égards, dangereusement. La langue de bois de nos politiciens, n'est-elle pas une forme primaire de Novlangue, ce langage rudimentaire prisé par les dirigeants totalitaires de 1984? Internet ne sert-il pas de défouloir collectif à l'image des ces «Deux minutes de la haine» de la pièce?  Une adaptation qui ne laisse personne indifférent.

La distribution est sublimée par un Maxim Gaudette en total contrôle de son personnage. Alexis Martin est juste assez froid et cynique dans son rôle d'initiateur qui se mue en tortionnaire. Claudiane Ruelland est une admirable Julia.

À ne pas manquer!
Un spectacle qui questionne et qui amène le spectateur à poser un regard différent sur notre société. Une pièce à ne manquer sous aucun prétexte pour ceux qui n'ont pas peur de sortir de leur zone de confort.

Au Trident jusqu'au 28 novembre. Avec Véronique Côté, Jean-Michel Déry, Maxim Gaudette, Eliot Laprise, Justin Laramée, Alexis Martin, Claudiane Ruelland et Réjean Vallée. Une mise en scène d'Édith Patenaude. Un texte de George Orwell.

Bon théâtre et bonne danse !

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