jeudi 31 août 2017

De lourdes conséquences pour Québec!

Frédéric Dubois, Édith Patenaude, Fabien Cloutier, Noémie O'Farrell, pour ne nommer que ceux-là, ont quitté Québec au cours des deux dernières années. Si le phénomène n'est pas nouveau, il a repris de la vigueur dernièrement. Pourquoi ces départs? Québec se vide-t-elle des ses talents théâtraux?

Un billet de Robert Boisclair


Le milieu théâtral est vigoureux à Québec. Cinq théâtres professionnels offrent une programmation intéressante et variée, pas suffisamment au goût de celui qui vous écrit, mais fort variée tout de même: théâtre jeune public (Les Gros Becs), théâtre de la relève (Premier acte), théâtre de création et pour un public curieux et ouvert (Périscope), théâtre de répertoire et contemporain (Trident et La Bordée). Le théâtre de Québec s'exporte également. Jamais, de mémoire de critique, n'y a-t-il eu autant de pièces de Québec présentées à Montréal. Et c'est sans oublier les pièces qui font le tour de la planète. Ou la présence forte de Robert Lepage et son Diamant, qui prendra racine dans les murs de la vieille ville dans un avenir rapproché.

Malheureusement, nos artistes et nos artisans du théâtre ne peuvent en vivre adéquatement. Québec n'a aucune tête de pont télévisuelle et le peu de productions qui se font ici sont souvent squattées par des têtes d'affiches montréalaises. Les réseaux qui produisent à Québec investissent peu dans la relève locale. Et les productions cinématographiques sont rares, malgré la présence d'une antenne des Studios Mels à Québec. Il n'y a pas de doublage non plus dans la capitale. Et c'est sans oublier, la faible utilisation de nos comédiens dans les publicités des annonceurs locaux. Vous pouvez à ce sujet, consulter mon billet de 2014 intitulé Coup de gueule: «Casting» AVEC code postal. La preuve que la situation ne date pas d'hier.

Si le programme Première Ovation, une mesure d’aide instaurée par la Ville de Québec et qui a pour but de supporter l’émergence de la relève artistique, a permis de stopper l'hémorragie un temps, il semble bien que l'exode ait repris. Chaque déménagement vers Montréal est une lourde perte pour Québec. Une perte culturelle inestimable. Certains de ces artistes feront leur marque à Montréal où ils offriront de splendides performances ou collaboreront à de magnifiques spectacles. Spectacles qui, s'ils étaient produits ici, enrichiraient l'offre culturelle de Québec, attireraient des visiteurs qui voudraient découvrir ces spectacles dans notre belle ville, génèreraient des investissements importants et, c'est sans doute le plus important, feraient de Québec une grande capitale culturelle, une ville qui rayonnerait bien plus sur le plan culturel.

Et la danse?
La danse connaît une belle croissance depuis quelques années. Le milieu est vigoureux, La Maison pour la danse de Québec débute sa programmation d'ouverture officielle le 5 septembre et les spectateurs sont au rendez-vous. Malheureusement, il n'y a que très peu de productions locales dans les programmations du Grand Théâtre de Québec, qui n'en présente jamais ou presque, et de La Rotonde qui en présente très peu à chaque saison (quatre productions sur treize la saison dernière).

Si la base artistique semble stable et que quelques-unes de nos vedettes locales (Harold Rhéaume et Karine Ledoyen) trouvent les moyens de subsister et de travailler régulièrement à Québec, ce n'est pas le lot de tous. La nouvelle mouture chorégraphique d'Annie Gagnon tarde à se pointer le nez, Brice Noeser est peu visible à Québec depuis Ruminant, ruminant présenté lors de la saison 2014-2015 et la relève multiplie les petits contrats ici et là pour continuer à se produire occasionnellement à Québec. Mais le feront-ils encore longtemps? Les voir quitter Québec serait une nouvelle tuile et une autre lourde perte pour Québec.


Des solutions?
Si une tête de pont télévisuelle est souhaitable, son arrivée à court et moyen terme n'est ni réaliste, ni envisageable. Si Christine St-Pierre, alors qu'elle était ministre de la Culture et des Communications, avait mis de l'avant ce qu'elle avait évoqué lors d'une interview, soit le déménagement de la tête de réseau de Télé-Québec à Québec, il y aurait ici une tête de pont télévisuelle et, peut-être, moins d'exils et plus d'emplois pour nos artistes et artisans. Mais nous n'en sommes pas là.

Il est impératif d'avoir un programme qui supportera les artistes en théâtre, en danse après les premières productions. Un programme qui aidera les artistes qui ont fait leurs preuves et qui permettra aux talents émergents formés ici de poursuivre leur carrière ici. De l'aide pour ces artistes qui ne sont pas encore des artistes de renom ou expérimentés mais qui sont dans le trentaine et la quarantaine et qui n'ont besoin que d'un coup de pouce pour pouvoir poursuivre leur carrière ici.

Il faut également que les communautés d'affaires et publicitaire de Québec laissent tomber leurs préjugés et engagent des artistes d'ici. Sans implication de toute la communauté, il n'y aura pas de grand avenir pour nos artistes et de plus en plus d'excellentes productions seront faites à Montréal plutôt qu'à Québec.

Il est temps d'agir et de faire de Québec, une véritable capitale culturelle! Qu'attendent nos décideurs? Agissez dès maintenant mesdames et messieurs! Et les retombées n'en seront que plus grandes pour Québec et pour vous.

Bon théâtre et bonne danse!

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