jeudi 12 octobre 2017

Hypo: droit au coeur

Premier acte propose un véritable hymne à la vie avec ce magnifique bijou qu'est Hypo. Un spectacle qui va droit au coeur avec des moments d'une rare sincérité.

Une critique de Robert Boisclair

Crédit photo: Cath Langlois
Un homme apprend qu'il va mourir. Refusant d'attendre la fin à l'horizontale, il décide de partir, debout, à sa rencontre. Il laisse tout derrière et s’exile dans une terre qui ressemble au début ou à la fin des temps, où les glaciers chevauchent les volcans. Dans un camping, une femme propose de lui prêter main-forte dans son projet. À bord du même sac de couchage, ils prennent la route vers l'ultime destination.

Lumineuse
Ne vous laissez pas berner par la thématique abordée, un homme en fin de vie qui part à la rencontre de sa mort, car ce spectacle est d'une immense luminosité. Le discours s'il est franc, honnête, direct, aborde la vie, dont la mort fait inéluctablement partie, de la plus belle façon. Dans ses moments de franchise, qui meublent trop peu souvent nos vies. Dans sa rencontre intime avec un autre humain. Dans ses petits gestes du quotidien qui sont si rassurants. Dans le partage sans fard de douleurs, petites ou grandes, qui nous habitent. Dans les blessures que la présence rassurante de l'autre nous permet de partager. Dans ses moments de folie que, parfois, on ose faire. Dans ses petits riens qui font que la vie est belle. C'est pour tout ça qu'Hypo va droit au coeur.

Crédit photo: Cath Langlois
Huis clos dans un grand dehors
Premier acte décrit le spectacle comme un huis clos dans un grand dehors et la promesse est tenue. La mise en scène et la scénographie mettent bien en évidence ce concept. La scène, à la fois presque vide et bien peuplée d'accessoires, donne la double impression de l'immensité du territoire et de l'espace restreint.

À l'arrivée des spectateurs, les comédiens et le musicien sont installés en fond de scène entre quatre écrans. L'un tapote le clavier de son téléphone intelligent, un autre lit et un dernier attend impatiemment le résultat de son examen médical.

Le centre de la scène est dénudée tout en étant recouvert d'une substance qui semble être de la terre. En son pourtour des cailloux, beaucoup de cailloux, donnant l'illusion de la terre islandaise, gros caillou au milieu de l'océan. Le décor est planté. Place aux comédiens. Le huis clos se met en place doucement. La rencontre fortuite. Le début du compagnonnage. La franchise qui s'installe rapidement. Les confidences douloureuses. L'amitié et, qui sait, l'amour. Puis, le dénouement, magnifique moment d'une très grande tendresse.

Mary-Lee Picknell a, semble-t-il, insisté pour que Nicola-Frank Vachon mette au monde ce texte. Dieu qu'elle a bien fait! Rarement un texte va-t-il à l'essence même des humains que nous sommes. Un texte qui va droit au coeur et qui nous rassure sur notre humanité en ces périodes où l'actualité nous rappelle trop souvent l'envers de notre propre médaille.

Crédit photo: Cath Langlois
Cinématographique
La mise en scène est cinématographique. Les écrans servent à créer les lieux et offrent de très beaux moments. La scène de l'orage est splendide. La projection sur les écrans et l'éclairage, magnifique, donnent l'impression que l'on y est. La scène au bord de mer où des vagues géantes les submergent presque est également d'une très grande réalité.

Le spectacle ne serait pas complet sans les nombreuses touches d'humour et la musique en direct de Philip Larouche ainsi que les chansons à deux ou à trois qui contribuent à l'ambiance intimiste. Dès la première chanson, tout au début du spectacle, le huis clos dans le grand dehors, évoqué plus haut, s'installe. Les comédiens, complices et d'un naturel désarmant, sont excellents. J'ai redécouvert Nicola-Frank Vachon et Mary-Lee Picknell.

Il y a bien quelques faiblesses à ce spectacle, mais tout le reste fait oublier ces petites choses, qui sont sans importance après tout.

Droit au coeur
Vous l'aurez compris ce billet n'est pas tout à fait une critique,  et je m'en excuse auprès des artisans de ce spectacle ainsi que de vous chers lecteurs, mais un cri du coeur. Celui d'un humain qui a été touché par d'autres humains au plus profond de son être. J'écris ces lignes et j'en ai les larmes aux yeux. Je ne sais pas si vous serez touché autant que moi en voyant ce spectacle mais c'est le bonheur que je vous souhaite.

P.S. à Nicola-Frank Vachon et Mary-Lee Picknell: vous n'avez aucune raison d'avoir peur. Ce spectacle est magnifique. Merci!

Allez-y surtout si vous aimez: les huis clos, la vie ou si une bonne dose de sincérité est requise, les textes imagés, drôles et touchants.

À Premier acte jusqu'au 28 octobre. Avec Philip Larouche, Mary-Lee Picknell et Nicola-Frank Vachon. Une texte de Nicola-Frank Vachon. Une mise en scène de Maryse Lapierre.

Vous voulez en savoir plus? Écoutez notre interview avec Mary-Lee Picknell et Nicola-Frank Vachon ici (vers la vingtième minute de l'émission du 2 octobre).

Bon théâtre et bonne danse!

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