vendredi 9 mars 2018

Incendies: le temps de la colère, le temps de l'amour

Une des répliques de la pièce la résume bien: L'enfance est un couteau planté dans la gorge. On ne le retire pas facilement.  L'amour doit céder la place à la violence. Le temps de la colère doit céder le pas à celui de l'amour. C'est ce que propose le Trident avec ce texte magnifique de Wajdi Mouawad sur un passé qui rattrape le présent.

Une critique de Robert Boisclair


Plongée dans un passé traumatique
Incendies, c'est l'histoire d'une femme ayant vécue une guerre civile et religieuse. Elle vient de mourir et laisse à ses enfants un testament en forme de mission: remettre une lettre à un père qu'ils croyaient mort, une autre à un frère dont ils ignoraient l'existence. Une quête qui les lancera sur les traces de leur mère au Liban, pays qu'elle arpenta autrefois. Une recherche qui sera une véritable tragédie, un incendie qui les consumera entièrement.

Intrigue policière et maison maudite
Incendies est d'abord et avant tout, une enquête policière. Une intrigue mystérieuse où les indices se dévoilent lentement, tenant en haleine le spectateur. Le tout aboutira dans un déliement surprenant où un monstrueux secret de famille sera révélé.

Si l'enquête est bien mené, la livraison laisse perplexe. Incendies est une pièce à la diction particulière. Le texte en mode hargne, agace, dérange. L'émotion n'est pas au rendez-vous. Les comédiens ne semblent être que le réceptacle d'un texte, d'une parole à transmettre. Heureusement, l'émotion s'immisce au moment du dénouement. Lise Castonguay y livre une vibrante ode à l'amour. Cette portion du spectacle est immensément bouleversante. Un moment magique qu'une magnifique mise en scène sublime.

La scénographie composée d'un salmigondis d'objets hétéroclites suggèrent, sans la désigner explicitement, une zone de guerre. Cependant, le texte poétique mais dense de Mouawad est noyé par cet environnement encombré.

Théâtre de l'intime
Il y a des secrets, des incendies qui brûlent en chacun des protagonistes et Mouawad le souligne de brillante façon avec un texte de l'intime. C'est une des grandes forces de ce spectacle. Les incendies qui brûlent laissent des marques, des plaies ouvertes qu'il faut refermer. La colère cède sa place à l'amour. Le texte soulève des questions existentielles qui ne laissent pas indifférent, loin de là.

Incendies n'est pas une pièce sur la guerre, à proprement parlé.
C'est une pièce sur les promesses qu'on ne tient pas,
sur les tentatives désespérées de consolation,
(...) sur la façon de rester humain dans un contexte inhumain.
Wajdi Mouawad

Allez-y surtout si vous aimez: les dénouements qui jettent à terre, les textes de l'intime, les intrigues mystérieuses.

Au Trident jusqu'au 31 mars. 
Avec Charles-Étienne Beaulne, Lise Castonguay, Gabriel Fournier, Marie-Hélène Gendreau, Véronika Makdissi-Warren, Dayne Simard, Jean-Sébastien Ouellet, Nathalie Séguin, Réjean Vallée et Sarah Villeneuve-Desjardins. Un texte de Wajdi Mouawad. Une mise en scène de Marie-Josée Bastien.

Bon théâtre et bonne danse!

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