jeudi 20 septembre 2018

La réunification des deux Corées: parcelles d'amour

Vingt courts moments dans la cour des sentiments. La réunification des deux Corées passe l'amour, l'amitié, l'affection, le désir aussi, à la moulinette dans une production qui se donne des airs de cinéma.

Une critique de Robert Boisclair
Twitter: @Rob_Boisclair et @Enfantsparadis

En répétition
Synopsis (tiré du site web du théâtre)
Amants, amis, couples mariés ou adultères, anciennes histoires ou relations passagères. Histoires d’amour et, surtout, de manque d’amour. En une mosaïque d’une vingtaine de tableaux, La réunification des deux Corées brosse tout autant de portraits de ce qui anime et déchire nos vies, et nous donne ce précieux sentiment d’exister.

Un couple, c’est aussi une lumière qui prévient les autres de votre existence.
C’est ce que nous a expliqué le psychothérapeute que nous allons voir.
Extrait du spectacle

En quête de vérité
Pommerat, l'auteur, offre des parcelles d'amour. Par petites touches des moments d'amour, de tendresse, d'affection parsèment le spectacle. Mystère impalpable qu'explore plus qu'il n'explique Pommerat. Moments de vie amoureuse parfois absurde ou surréaliste, réaliste ou très terre-à-terre à d'autres occasions. La relation qui unit deux êtres n'est pas chose simple. Elle est surtout complexe. Indescriptible.

Qui sait vraiment ce qu'est aimer? Aimer, est-ce un sentiment unique pour chacun? Aimer suffit-il pour être en couple? Des questions présentes tout au long du spectacle et qui ne trouvent pas véritablement de réponses. Que des questions soulevées. Parfois avec un bel humour. Comme cette scène du mariage ou la mariée découvre le passé plutôt obscur de son futur mari. Jamais mariage n'aura été aussi rocambolesque et superbement drôle.

Ce qui ressort de tout ça, c'est une quête de vérité. Chacun cherche sa vérité. Son propre sens dans toutes les possibilités d'amour, de tendresse et d'affection. Des solitudes qui, chacune, cherchent à donner un sens, une signification à cette émotion qui les attire comme un aimant.

En répétition
À cette quête de vérité, il manque une bonne dose de ressentis. De moments où l'émotion passe de la scène à la salle. Ces instants magiques sont peu nombreux. Malheureusement. Mais ils valent le détour.

L'un des plus beaux et touchants moments est cette promenade dans la cour entre le mari et sa femme souffrant de la maladie d'Alzheimer. L'étreinte comme la première fois, le désir présent même si le souvenir ne l'est plus. Panne de souvenirs ne veut pas dire panne de désir. La quête de l'amour et de l'affection qui sont toujours présents, souvenirs ou pas. La tendresse sous-jacente dans le texte. Deux comédiens justes qui rendent ce moment précieux. Et cette douce et belle étreinte, encore elle, vécue comme si c'était la première fois ou, peut-être, la dernière.

De belles métaphores s'y glissent. La promenade dans la cour, symbole de l'urgence d'agir avant qu'il soit trop tard. Elle qui le rattrape constamment, comme ces souvenirs qui lui font défauts et qu'elle voudrait bien retrouver. Petit bijou que cette saynète.

En répétition
Fondu au noir
La mise en scène avec ses fondus au noir donne un air de cinéma à ce spectacle. Les courtes saynètes ponctuées de musique accentuent cet effet cinématographique. Tout comme ce prélude avec un chanteur et les personnages qui défilent et que l'on retrouve en conclusion de spectacle.

Cette succession de courtes saynètes, si elles donnent un effet cinéma, diminue notre plaisir. Il y a un effet d'incomplétude. Il y manque un développement plus poussé. Une vague impression que le moment proposé n'a pas donné tout ce qu'il pouvait donner.

Il y a beaucoup de noirceur ou d'inquiétudes dans cet ode à l'amour. Comme cette scène d'ouverture où une femme veut arrêter sa relation sans amour ou celle de cet homme qui crée une immense tension avec son ami en évoquant leur relation alors qu'ils n'étaient pas encore amis ou encore celle de l'ancien amoureux qui revient visité sa flamme d'autrefois alors qu'elle est dans une nouvelle relation. L'amour, l'affection, l'amitié prennent alors différentes teintes, différentes couleurs. Différents sens également. L'exploration se fait sous toutes les coutures. Ces sentiments sont remis en cause de moult manières.

En répétition
Allez-y surtout si vous aimez: les histoires désenchantées, les textes de Pommerat, les successions de courtes saynètes, les déclinaisons du verbe aimer.

À La Bordée jusqu'au 13 octobre. Avec Ann-Sophie Archer, Emmanuel Bédard, Normand Bissonnette, Gabriel Fournier, Valérie Laroche, Véronika Makdissi-Warren, Olivier Normand, Sophie Thibeault et Alexandrine Warren. Une mise en scène de Michel Nadeau. Un texte de Joël Pommerat.

Vous voulez en savoir plus sur le spectacle? Écoutez notre interview avec Alexandrine Warren et Normand Bissonnette ici (au tout début de l'émission du 10 septembre).

Bon théâtre et bonne danse!
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