vendredi 17 janvier 2020

Les Plouffe: succès assuré

Un spectacle de 2h 20 sans entracte où l'on ne s'ennuie pas une seule seconde. Une mise en scène dynamique et une superbe scénographie, entre autres, font de ce spectacle un des beaux moments de la saison 19-20. 

Une critique de Robert Boisclair
Twitter: @Rob_Boisclair et @Enfantsparadis


Synopsis ( tiré du site web du théâtre)
Nous sommes en 1938, en plein quartier St-Sauveur; Ovide Plouffe travaille dans une manufacture, mais ne s’en satisfait pas. Il rêve de s’élever au-dessus de tout ça. Il rêve aussi d’un rendez-vous avec la belle Rita Toulouse. Son frère Guillaume, lui, aspire à devenir joueur de baseball professionnel aux États-Unis.

Tous les membres de la famille Plouffe se débattent avec le clergé, la misère et les revers du destin dans une société qui traverse de grandes mutations. La famille sera marquée notamment par la Grande Dépression, la Deuxième Guerre mondiale, mais aussi, par les petites et les grandes trahisons.


Y’a pas de place, nulle part, pour les Ovide Plouffe du monde entier!

Crédit photo: Édouard Plante-Fréchette, La Presse
Des travailleurs de l'ombre efficaces
En ouverture de saison des deux grandes salles de théâtre de Québec, ce sont les oeuvres de jeunesse qui ont la cote. Après Wajdi Mouawad à La Bordée (notre critique ici), c'est au tour de Roger Lemelin d'y voir mis en scène son roman qu'il avait écrit alors qu'il n'avait que 28 ans.

Pari risqué s'il en est un. Dans le roman, inspiration principale de cette création théâtrale bien plus que le film qui a pris l'affiche en 1981, les lieux pullulent, il y a même une procession au Sacré-Coeur, et les personnages sont nombreux. Au final, l'adaptation compte une quinzaine de lieux qu'il fallait reproduire sur scène. Les travailleurs de l'ombre, Maryse Lapierre à la mise en scène et, surtout, la scénographe Marie-Renée Bourget Harvey, ont réussi l'impossible soit de créer une quinzaine de lieux avec uniquement un décor fixe. Mais quel décor!

Une structure à deux étages faites de bois. Dans le coin gauche, la cuisine de la résidence des Plouffe. Dans le coin droit, une petite scène en bois et un escalier. À l'étage, une balustrade. Tout ça derrière une avant-scène légèrement dégagée qui servira de lieu pour les scènes plus complexes ou requérant plus d'espace, comme le match de baseball. Ces lieux restreints réussissent avec quelques comédiens à créer une ambiance de foule, l'illusion est parfaite.


Crédit photo: Édouard Plante-Fréchette, La Presse
Les travailleurs de l'ombre, que l'on a tendance à oublier parfois tant ils sont efficaces, accomplissent ici un boulot remarquable. Mentionnons le travail d'André Rioux aux éclairages, véritable créateur d'espace en un clin d'oeil, et le trio de musiciens, Viviane Audet, Robin-Joël Cool et Alexis Martin, qui subliment les émotions du moment avec une musique à la fois discrète et prenante.

Que du bonbon
Il y a, dans cette production, un petit quelque chose qui vient nous chercher. Une parcelle de nous se retrouve dans ce spectacle qui célèbre ce que nous avons été. Le regard n'est pas nostalgique. Il est notre passé, certes, mais un passé annonciateur d'un bel espoir. Celui de devenir libre. Libre de penser. Libre de nos choix. Garant d'un avenir meilleur. Les Plouffe, c'est Québec qui vibre. Qui s'anime. Qui vit.

Maryse Lapierre, la metteuse en scène, et Isabelle Hubert, l'adaptatrice, ont admirablement bien traduit cette ambiance. Le texte est lumineux et la critique sociale y est remise à l'avant-plan. Isabelle Hubert a parsemé son texte de pointe d'humour.

La mise en scène est alerte et dynamique. Il s'y glisse, là aussi, un peu d'humour. Soyez attentif lors du match d'anneaux! Pas de temps morts dans cette saga de 2h 20. Rarement, un spectacle de théâtre a-t-il cette durée. En cette ère où tout dois se dérouler rapidement, il y avait un risque que le spectateur décroche. Ce n'est certes pas le cas. Le spectateur que je suis aussi en aurais pris encore.


Crédit photo: Édouard Plante-Fréchette, La Presse
En ce qui concerne la distribution, pas de faux-pas. Jean-Michel Girouard excelle, il est un fort sympathique naïf quelque peu gauche et un motivateur hors pair. La Rita Toulouse d'Alice Moreault est séduisante et pleine de vie. Renaud Lacelle-Bourdon est superbe avec son Ovide Plouffe plus solennel et prétentieux que celui du film. Marie-Ginette Guay, excellente comme toujours, offre un déliement tout en émotions. Elle nous tire les larmes avec sa tirade finale. La liste pourrait s'allonger encore tant la distribution offre de beaux moments.

Signe que le spectacle est un succès et qu'il séduit les spectateurs, la première d'hier soir a reçu quelque chose comme six rappels. Il y avait de la fierté dans l'air, tant dans la salle que sur scène. Un spectacle à ne manquer sous aucun prétexte!

Crédit photo: Édouard Plante-Fréchette, La Presse
Allez-y surtout si vous aimez: le bon théâtre tout simplement!

Jusqu'au 8 février au Trident. Avec Maxime Beauregard-Martin, Frédérique Bradet, Robin-Joël Cool, Alexis Déziel, Jacques Girard, Jean-Michel Girouard, Alex Godbout, Marie-Ginette Guay, Renaud Lacelle-Bourdon, Alice Moreault, Mary-Lee Picknell, Gilles Renaud, Nicola-Frank Vachon, Sarah Villeneuve-Desjardins. Un texte de Roger Lemelin dans une adaptation théâtrale d'Isabelle Hubert. Une mise en scène de Maryse Lapierre.

Bon théâtre et bonne danse!
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