mardi 11 septembre 2018

Just In: politique fiction

Quand la réalité politique rencontre la fiction politique, cela donne un mélange explosif mais surtout fantastique.

Une critique de Robert Boisclair
Twitter: @Rob_Boisclair et @Enfantsparadis

Crédit photo: Cath Langlois
Synopsis (tiré du site web du théâtre)
Le lendemain d'une victoire politique importante, un homme reprend conscience, nu au milieu d'une chambre inconnue. Réveillé par son attaché de presse qui a reçu une étrange vidéo compromettante, l'homme essaiera de reconstituer les événements de la veille dont il ne se souvient plus. Pourchassé par un monstre fabuleux, il devra faire vite s'il veut conserver son image de marque et, entre deux égoportraits, découvrir les origines extraordinaires de son existence.

Baigné par la musique envoûtante de Millimetrik, Just In est un solo politico-fantastique inspiré par la politique actuelle. Monologue à l'action déconstruite, il puise son essence dans la mythologie afin de mettre en lumière une ascension vers le pouvoir arrangée de toutes pièces et prévue à l'horaire depuis des siècles et des siècles. L'auteur se sert ici du fantastique pour poser plusieurs questions sur la responsabilité de l'électeur ainsi que sur son rapport à l'image. Par l'entremise d'un récit haletant, où le surnaturel côtoie des lieux communs, le spectateur assistera à une métamorphose complète qui promet de ne laisser personne indifférent.

Politique fiction
En cette période électorale québécoise, Lucien Ratio invite les spectateurs dans l'univers politique. Une virée où Trudeau et complot ne font qu'un dans une saga politico-fantastique. Si la prémisse de départ est bien ancré dans le réel, de nombreux moments politiques des dernières années s'y retrouvant, le fantastique s'y amène plutôt rapidement. Et c'est là que le bât blesse. La caricature prometteuse du début s'enlise. On se perd dans un histoire plutôt abracadabrante.

L'idée étant sans doute de mettre en évidence le vide abyssal de la politique, le manque de vision ou l'absurdité de certaines situations mais là on pousse un peu trop. Le mimétisme des situations domine bien plus que la critique acerbe ou la démonstration virulente. Lucien Ratio réussit tout de même à faire ressortir que derrière l'image proprette et le verni de nos politiciens, il n'y a pas d'homme de visions. Que du faux et du formaté. Que de la politique fiction et des images racoleuses. Point de vision ou de grands idéaux. C'est de cette manière qu'il frappe juste et qu'il met le doigt sur le grand malaise qui habite les électeurs un peu partout sur la planète. Le vent de changement, c'est un peu ça: des politiciens qui laissent tomber le verni et le faux-semblant pour parler d'avenir, de rêves de société et être de véritables porteurs d'espoir.

Crédit photo: Cath Langlois
Quiconque s'intéresse, ou pas, à la politique y trouvera son compte. Le rythme est bon et l'humour s'y glisse à plusieurs reprises. Les références sont faciles à décoder. Parfois, souvent même, le spectateur réalise à quel point la politique est absurde à certaines occasions.

Audacieux solo
Lucien Ratio s'offre, pour son premier solo, une performance parfois très athlétique. Il a de l'énergie à revendre ce Lucien Ratio. Pendant une heure dix environ, il se démène sur scène, interprète tout les personnages, et ils sont nombreux, et s'offre des égoportraits à profusion, caricature de politicien oblige. Il est très énergique du début à la fin, parfois trop.

Crédit photo: Cath Langlois
Il faut bien de l'audace et du courage pour offrir un tel spectacle. Seul sur scène et avec un décor très minimaliste, deux iPads, une flopée de drapeaux canadiens et un fauteuil, ils nous tient en haleine. Et pour aborder la politique en pleine période électorale, il faut du culot. Et ça Lucien Ratio n'en manque pas. Écorcher Justin Trudeau, même avec des touches de Rob Ford et de Donald Trump ainsi qu'un soupçon de Maxime Bernier, demande un aplomb certain et une grande énergie. Chapeau Lucien Ratio.

Crédit photo: Cath Langlois
Allez-y surtout si vous aimez: les contes fantastiques, voir les politiciens en prendre plein la gueule, vous détacher d'une campagne électorale qui n'offre pas de grands thèmes rassembleurs, voir un comédien qui se donne à fond.

À Premier acte jusqu'au 22 septembre. Avec Lucien Ratio. Une mise en scène de Jocelyn Pelletier. Un texte de Lucien Ratio.

Bon théâtre et bonne danse!
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