mardi 17 février 2015

Oh les beaux jours: oh le beau spectacle!

Une belle surprise que ce Oh les beaux jours qui nous arrive directement de France. La merveilleuse Catherine Frot y rayonne dans un rôle qui semble taillé sur mesure pour elle.

Une critique de Robert Boisclair


Quelque part dans un désert brûlant, Winnie, une femme bien vivante mais ensevelie dans un promontoire de terre et lichen, est prisonnière de son immobilité. Elle n'a pour ami que Willy, son mari, un être à l'état larvaire, très peu volubile et plutôt bougon. Pour passer le temps, Winnie babille constamment. Des banalités, des petits riens qui meublent ses journées.

Rayonnante Frot
Dans ce spectacle, qui n'est qu'un long monologue de Winnie entrecoupé de quelques grognements et de très courtes répliques de Willy, Catherine Frot est vibrante d'humanité. Elle souhaitait interpréter ce rôle depuis longtemps et l'attente en valait la peine. Winnie lui sied à merveille.

La Winnie de Frot est candide, lunaire et tellement attachante. Elle chante la vie. Dans ses petits riens.  Elle y glisse un parfum d'humour qui lui est très personnel. Doucement. Tranquillement. Comme la vie qui s'écoule lentement. Sa Winnie est bien vivante malgré un état larvaire qui l'empêche de bouger, d'agir. Malgré cet immobilisme Winnie vit. Très bien. Et Catherine Frot incarne merveilleusement ce bonheur, cette joie de vivre, cette appréciation des petits moments répétitifs qui font les beaux jours de Winnie.

Petits bonheurs perpétuels
Les petits bonheurs perpétuels que Winnie s'offre tout au long de la pièce rappellent l'urgence de vivre. De profiter de chaque moment. Ou n'est-ce que du babil perpétuel? Pour meubler le temps. Pour combler ce vide que nous abhorrons. Je penche plutôt pour l'acharnement à vivre. Beckett décrivait Winnie comme un «être en apesanteur que la terre cruelle dévore». Winnie, malgré son état, est animé d'une envie folle de vivre. De résister. De se battre. Pour la vie. Pour elle.

La Winnie de Catherine Frot est lucide, un brin mélancolique mais joyeuse, vivante. C'est là, l'essence même de son personnage. Et c'est ce qu'incarne Catherine Frot. Magistralement.

Une mise en scène sobre
Pas de flafla. Une protubérance trône au centre de la scène. Amas de terre et de lichen au centre duquel s'enlise le personnage principal. Derrière une toile immense. Espace infini ou céleste. On ne sait trop. Merveilleux contraste qui s'oppose à l'état de prisonnière de Winnie.

Quelques accessoires occupent l'espace environnant de Winnie. Un sac rempli de babioles, qui ne seront distillés que parcimonieusement tout au long de la pièce, et une ombrelle. Des éclairages sobres mais lumineux à la fois viennent compléter l'ambiance. Nous sommes nulle part et partout à la fois.

L'ambiance est créée et ouvre la porte, toute grande, à la Winnie positive et légère, lucide et rêveuse que nous offrent Marc Paquien, le metteur en scène, et Catherine Frot.

Oh le beau spectacle!
On les beaux jours est un petit bijou qu'il faut aller voir. Malheureusement, les représentations à Québec sont complètes. Si le coeur vous en dit, offrez-vous le Théâtre du Nouveau Monde à Montréal. La production y tiendra l'affiche du 21 au 26 février. Et, peut-être, comme moi, vous aurez envie de vous exclamer «Oh le beau spectacle!»

À la Bordée jusqu'au 18 février et au Théâtre du Nouveau Monde du 21 au 26 février. Avec Catherine Frot et Éric Frey. Une mise en scène de Marc Paquien.

Bon théâtre et bonne danse !

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