mardi 30 janvier 2018

La sélection du moment: J'accuse (version livresque)

La sélection du moment c’est une suggestion, une seule, d’un film ou d’un livre sur le théâtre ou la danse, d’un spectacle dansé ou théâtralisé ou encore d’un événement relié à un de ces deux arts que vous ne devez manquer sous aucun prétexte. Vous pouvez découvrir celle-ci en primeur lors de l'édition radiophonique du lundi.

Par Robert Boisclair


J'accuse (version livresque)
Comme moi, vous avez été pris d'un amour fou pour la pièce qui a tenu l'affiche de La Bordée à l'hiver 2017 et vous aimeriez avoir le texte sous la main afin de retrouver le cri de ces cinq femmes? La version livresque vous offrira cette chance. En prime vous pourriez même mettre la main sur la version belge.


Une pièce coup de poing qui fera chavirer votre coeur une deuxième fois. Cinq femmes qui ont le courage de leurs convictions. Violence, tendresse et mélancolie au menu. Le langage est cru, violent, choquant. Il dérange, mais questionne surtout. Cinq cris du coeur pour se libérer. Des appels à l'aide vibrants de femmes en mode survie. Un texte qui vous marquera à nouveau et que vous pourrez lire et relire pour comprendre l'angoisse de ces femmes. Et, peut-être aussi, mieux comprendre la vôtre.

C'est faux d'affirmer que je profite de la job steady de mon chum à Revenu Québec,
de son statut de fonctionnaire provincial pis de la stabilité de sa situation financière
pour placer toutes ses cennes pis mes angoisses d'en manquer dans des REERS conjoints
qu'on va juste pouvoir retirer quand on va avoir quatre-vingt-dix-sept ans
pis la mobilité de la statue de cire de René Angélil au Musée Grévin [...]

Résumé
Elles sont cinq. Elles ragent. Il y a la fille qui encaisse, qui vend des bas de nylon à partir de 6 h 30 du matin dans le sous-terrain du métro Bonaventure. Il y a la fille qui agresse, qui a eu le culot de partir sa propre PME dans un contexte économique difficile. Il y a la fille qui adule, qui est une fan inconditionnelle d’Isabelle Boulay. Il y a la fille qui intègre, qui travaille dans un CPE et qui s'efforce de prendre soin de la jeunesse du Québec. Puis il y a la fille qui aime, qui est travailleuse autonome, qui écrit et qui dilapide beaucoup d’amour et en dirige si peu envers sa petite personne. Que des filles avec de la drive et beaucoup d’ambition. Que des filles qui s’expriment par instinct de survie.

Parce que moi, Filion, je le trouve pas mal plus sensible,
terre à terre pis proche du peuple que les gauchistes boboches
qui rêvent en couleurs dans leur monde de préservation des ressources naturelles!

Auteur:Annick Lefebvre
Éditeur : Dramaturges Éditeurs

Bon théâtre et bonne danse!

lundi 29 janvier 2018

L'amour, encore l'amour!

L'amour s'invite aux Enfants du paradis ce soir. L'amour de l'art côtoiera l'amour avec un grand A et l'amour de son coin de pays. En complément de programme, une Sélection du moment livresque. Offrez-vous une grande dose d'amour dès 17h 30 à l'antenne de CKRL!

Par Robert Boisclair

Premier bloc - 17h 30


L'émission débutera avec l'amour de l'art en compagnie d'Ariane Plante, commissaire du Mois Multi. Nous effectuerons un rapide tour d'horizon des spectacles aux saveurs dansés et théâtrales de ce festival multidisciplinaire.

Mois Multi
Différents lieux
Du 2 au 25 février
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Deuxième bloc - vers 17h 45


Soyez à l'écoute vers 17h 40 pour connaître notre Sélection du moment. Cette semaine une suggestion de théâtre en version livresque. Soyez des nôtres pour la découvrir mais si vous ne pouvez y être en direct, pointez-vous le nez sur ce blogue dès 6h00 demain pour la connaître.

Troisième bloc - vers 17h50

En répétition
Crédit photo: David Mendoza Hélaine

David Bouchard et Jean-Michel Déry seront en studio pour nous parler de l'amour avec un grand A et, surtout, de la fragilité du lien amoureux.

Closer - Tout contre toi
Une production du Périscope présentée au Centre des congrès
Du 6 au 22 février
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Quatrième bloc - vers 18h 10

Crédit photo: Cath Langlois

Éve Méquignon et Camille Proust viendront nous parler de la lettre d'amour complètement déjantée d'Oliver Arteau aux Québécois. Petits et grands travers sont passés au peigne fin dans un spectacle bien de son temps.

Made in Beautiful (La belle province)
Premier acte
Jusqu'au 3 février
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Bon théâtre et bonne danse !

mercredi 24 janvier 2018

Made in Beautiful (La belle province): la fin des exils?

Le Théâtre Kata propose une oeuvre frondeuse et aux apparences souverainistes. Une succession de tableaux déjantés qui plaira aux jeunes comme aux moins jeunes.

Une critique de Robert Boisclair


Halloween et souveraineté
Halloween 1995, soirée sandwichs pas d’croûte, pâté chinois et gâteau McCain. Autour d’une grande tablée, Linda, dans la cinquantaine fringante, reçoit ses meilleurs amis et sa famille pour une fête costumée. L’ancien amant qui a viré gai, déguisé en geisha, côtoie une grande échalote déguisée en Sriracha ; le chum de la matante, attriqué en poussin, niaise la copie ratée de E.T. pis Agathe, comme pas une, se garnit la face de Nutella pour ressembler à Halle Berry dans Catwoman.

Dans une succession de tableaux à la fois absurdes et déjantés, on trouve les protagonistes en train de débattre sur la question de l’immigration, du féminisme pis de la mise en plis de Cynthia. Après deux ou trois verres de rhum and Coke, on se met à jouer à un jeu questionnaire sur l’histoire de notre province… et tout le monde perd. Soudainement, le mutisme, l’ignorance, le manque d’éducation, la faillite de la rhétorique s’emparent de nous…

« On n'attendra pas quinze ans, cette fois-là », disait, ce soir-là, Jacques Parizeau. La mondialisation, le pouvoir d’achat et les technologies nous écartent-ils progressivement d’un grand rêve collectif? Le capitalisme nous rend-il uniformes, individualistes et ignorants?

Théâtre Kata mord avec un brin d’acidité, mais avec beaucoup d’humour, dans les mœurs et coutumes de notre peuple par une création hybride conjuguant l’improvisation, la performance alimentaire et le karaoké, mêlant nos désirs inassouvis et ceux qui grondent.

Fougueuse jeunesse
La mise en scène éclatée mets bien en évidence la fougue et la douce folie de la jeunesse. Le trash y côtoie le traditionnel de splendide manière. Quelques numéros musicaux permettent de faire des transitions en douceur entre une série de vignettes halloweenesques où les membres d'une même famille partagent leurs joies, leurs peines, leurs déceptions et leurs interrogations.

C'est peut-être là que le bât blesse. Dans les interrogations. Si le spectacle permet de faire un agréable voyage de 1995 à aujourd'hui, les questions soulevées demeurent sans réponse. Dans le programme, le metteur en scène se questionne sur les désirs inassouvis et sur ce qui gronde. Il donne comme réponse qu'il cherche et que c'est encore flou. Et c'est justement un peu ça cette pièce. Le survol des événements est intéressant. Il donne une belle image de notre passé. Mais qu'en est-il aujourd'hui? Que pense cette fougueuse jeunesse? Que veut-elle comme société? Les fuites en avant et les exils achèvent-ils? Il n'y a pas de réponse suggérée. Un beau parcours qui finit en cul-de-sac et qui laisse sur son appétit.

Made in Beautiful (La belle province) est profondément ancré dans son époque. Les anglicismes, caractéristiques de la jeune génération, pullulent, l'esprit est à la fête, le discours est parfois bien superficiel et puéril et les problèmes soulevés sont rapidement évacués.

On s'amuse ferme à l'écoute de certaines répliques punchées ou vides de sens. Le ballet des répliques et des scènes est fort bien rythmé mais donne parfois dans l'excès. Les discussions s'apparentent alors à des joutes verbales qui donnent du fil à retordre aux spectateurs.

Les comédiens offrent tous de belles performances. Ariel Charest, avec son humour pince-sans-rire, et Marie-Josée Bastien, solide et magnifique dans son rôle de femme qui souffre d'Alzheimer, se démarquent particulièrement.

Joli portrait
Made in Beautiful (La belle province) dresse un portrait drôle, sympathique et fort réaliste des 22 dernières années. S'y ajoute une touche caricatural dans les costumes, entre autres, qui rend le tout fort agréable. En bout de course Olivier Arteau et sa joyeuse bande de lurons offrent un spectacle qui captive son auditoire.

Allez-y surtout si vous aimez: le théâtre Kata, les spectacles complètement déjantés, les productions frondeuses, les oeuvres aux tendances souverainistes.

À Premier acte jusqu'au 3 février. Avec Léa Aubin, Marie-Josée Bastien, David Bouchard, Ariel Charest, Gabriel Cloutier Tremblay, Jonathan Gagnon, Lucie M. Constantineau, Marc-antoine Marceau, Vincent roy et Nathalie Séguin. Un texte et une mise en scène d'Olivier Arteau.

Vous voulez en savoir plus? Écoutez notre interview avec Olivier Arteau et Lucie M. Constantineau ici (au début de l'émission du 15 janvier).

Bon théâtre et bonne danse!

mardi 23 janvier 2018

La sélection du moment: Le Visiteur

La sélection du moment c’est une suggestion, une seule, d’un film ou d’un livre sur le théâtre ou la danse, d’un spectacle dansé ou théâtralisé ou encore d’un événement relié à un de ces deux arts que vous ne devez manquer sous aucun prétexte. Vous pouvez découvrir celle-ci en primeur lors de l'édition radiophonique du lundi.

Par Robert Boisclair


Le Visiteur
Livrée au rythme du violoncelle, cette pièce questionne notre rapport au bien et au mal. Une rencontre entre le psychanalyste Sigmund Freud, désespéré, qui reçoit un étrange visiteur. Un dandy léger, cynique qui entre par la fenêtre et tient d’incroyables discours...

L'auteur Éric-Emmanuel Schmitt dit l'avoir écrite après regardé le bulletin de nouvelles de 20 heures en France. Il désespérait de n'y entendre que des crimes, de la guerre ou de la violence. Il s'est alors interrogé sur Dieu.

« Si Dieu a une dépression que peut-il faire? Quel recours? Qui peut-il aller voir? »
Éric-Emmanuel Schmitt

Il a alors eu l'idée de mettre face à face Dieu et Freud. Une rencontre plutôt improbable puisqu'ils n'ont rien en commun et qu'ils ne s'entendent sur rien.

Le Visiteur est un texte sur l'existence de Dieu, même si le doute persiste tout au long de la pièce sur l'identité de cet étrange personnage, et la religion. Un récit qui va plus loin en interrogeant sur Dieu mais aussi sur l'homme qui choisit le mal plutôt que le bien.

Résumé de la pièce
L’action se situe dans le cabinet de Sigmund Freud, à Vienne, le soir du 22 avril 1938. Les troupes allemandes ont envahi l’Autriche le 12 mars 1938 et commencent à faire régner l’ordre nazi.


Freud est avec sa fille, Anna. Ils discutent de la vieillesse, du péril nazi, de la violence à l’encontre des Juifs. Freud ne veut pas encore partir. Anna le presse de signer un document qui leur permettrait de quitter Vienne avant qu’il ne soit trop tard. Un homme de la Gestapo fait alors irruption dans l’appartement et menace le vieil homme. Anna réagit violemment, elle est arrêtée et emmenée dans les bureaux de la Gestapo pour interrogatoire. Freud, désespéré, appelle à l’aide l’ambassade américaine. L’ambassadeur accepte de l’aider à condition que Freud signe le document. Cette lettre est une négation de la réalité fasciste et des agissements criminels des nazis.

C’est alors qu’un homme surgit dans son cabinet. Le Visiteur refuse de donner son identité. Freud le traite d’abord comme un patient, tente l’hypnose, dialogue avec lui, puis devant l’improbable clairvoyance de certaines remarques sur l’avenir de l’humanité, il se résout à accepter le mystère.

Qui est ce visiteur? Un fou? Un mythomane? Un fantasme? Ou bien est-il, comme il le prétend, Dieu? Cette rencontre va mettre à l’épreuve l’athéisme du psychanalyste et susciter une réflexion sur le Bien et le Mal, et sur le libre-arbitre de l’Homme.

Le 25 janvier à L'Anglicane
Un texte d'Éric-Emmanuel Schmitt
Une mise en scène d'Ariel Ifergan
Avec Alain Fournier, Frédéric Desager, Jean-René Moisan,
Karine Lemieux et Frédérique Lapointe

Bon théâtre et bonne danse!

lundi 22 janvier 2018

Trip à trois... de critiques!

Ce soir un trip à trois culturel! En compagnie de trois de nos critiques nous discuterons des trois spectacles à l'affiche en ce moment dans les théâtres de Québec. Venez découvrir notre trop à trois culturel ainsi que notre Sélection du moment, dès 17h 30 à l'antenne de CKRL.

Par Robert Boisclair

Premier bloc - 17h 30

Crédit photo: Daniel Ross
Geneviève Martel sera en studio pour nous parler des confessions sans armure de Québécois courageux. Maladie, souffrance, deuil et rédemption au programme.

Hôtel-Dieu
Périscope
Jusqu'au 3 février
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Deuxième bloc - vers 17h 45


Soyez à l'écoute vers 17h 40 pour découvrir notre Sélection du moment. Cette semaine Dieu, Freud, le bien et le mal s'invite dans une production théâtrale d'un grand auteur contemporain qui sera présentée à Lévis. Soyez des nôtres pour la découvrir mais si vous ne pouvez y être en direct, pointez-vous le nez sur ce blogue dès 6h00 demain pour la connaître.

Troisième bloc - vers 17h50


David Lefebvre sera en studio pour nous offrir son commentaire critique de la pièce Quand la pluie s'arrêtera, une pièce tire-larmes qui a connu un grand succès à Montréal et qui tient l'affiche du Trident.

Quand la pluie s'arrêtera
Trident
Jusqu'au 10 février

Quatrième bloc - vers 18h 10

Crédit photo: Nicola-Frank Vachon
Geneviève Martel sera de retour en studio en compagnie de Camille Proust pour nous parler des nuits de Québec d'autrefois.

Mme G.
Bordée
Jusqu'au 10 février
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Bon théâtre et bonne danse!

samedi 20 janvier 2018

Quand la pluie s'arrêtera: réjouissante saga familiale

Les malheurs sont-ils héréditaires? Nous sommes notre passé mais notre futur peut-il prendre une tournure différente? Y a-t-il un espoir que les choses changent? Que le cycle s'arrête? Quand la pluie s'arrêtera s'intéresse à cette question de remarquables façons. Retour sur un spectacle réjouissant.

Une critique de Robert Boisclair


Deux continents. Quatre générations d'absence.
2039, en plein désert australien, un poisson tombe du ciel aux pieds d’un homme. Il pleut depuis des jours et cet homme sent que quelque chose ne tourne pas rond. Quatre-vingt ans plus tôt, son grand-père Henri l’avait prédit: quand les poissons tomberont du ciel, ce sera la fin de notre monde tel qu’on le connaît. Une fin du monde annoncée alors que son fils l'a contacté après des décennies d'absence. Il veut le voir. Que veut-il? Comment affronter cette rencontre aussi inattendue qu'espérée.

Y'en a qui disent que c'est la fin...
La fin du monde, c'est pour ça que je voulais te voir.
Andrew Price, interprété par Maxime Robin

Entre ces deux évènements, il y a la quête de réponses d’un jeune homme parti sur les traces de son père disparu. Quand la pluie s’arrêtera est une fresque qui se déploie entre 1959 et 2039, mettant en scène quatre générations d’une même famille à l'histoire pas toujours très heureuse. Entre un modeste appartement londonien et le désert d'Australie se côtoient des abominations familiales, des mères déprimées, des fils en quête du père et des pères tourmentés.

Une histoire pleine d’humanité, un mélange unique de drame, d’humour et d’espoir qui pose la question: peut-on réellement s’affranchir de notre héritage?

Merveilleux ballet
La mise en scène est organisée comme un magnifique ballet. Les protagonistes, immense famille transgénérationnelle, se croisent en de courtes scènes. L'histoire de chaque génération se raconte alors qu'une autre la croise, l'espace d'un instant. Cela donne l'impression que les générations sont intimement liées, qu'elles se parlent, s'écoutent et tentent de se comprendre.

Le ballet se transporte également dans les mots et les répliques qui reviennent d'une génération à l'autre, d'une époque à l'autre. Que vient donc faire cette pluie de répliques répétitives dans cette histoire? La soupe au poisson, les inondations au Bengladesh, les murs d'un blanc cassé et le désordre perpétuel demeurent une énigme... jusqu'à la toute fin. Le dénouement, merveilleux moment, résout le mystère.


Une structure narrative qui fonctionne par petites touches, à la manière des gouttelettes d'eau qui, après une trop longue accumulation, deviennent un orage violent au moment de l'éclatement des nuages. Les gestes sont répétitifs, les répliques déjà entendues reprennent vie dans la bouche d'un nouveau protagoniste. Un ballet de gestes et de mots qui prend tout son sens en fin de spectacle.

Voler l'avenir
La grande question de cette pièce pourrait être: sommes-nous incapable de changer la résultante des gestes posés par les générations précédentes? Chaque geste posé prive-t-il les générations suivantes d'un avenir meilleur?

T'as pas volé une miche de pain. T'as volé l'avenir.
Élizabeth Law, interprétée par Véronique Côté

La question est vaste. Les réponses possibles, multiples. La pièce se termine sur une sublime note d'espoir. Reste à savoir ce que nous en ferons. Le choix est nôtre. Notre avenir en dépend. L'éclatement de la vérité en toute fin de spectacle donne une réponse. La réponse? Sans doute. Mais il faut voir la pièce pour la connaître. Et elle vous surprendra fort probablement.


Tout en finesse
La mise en scène de Frédéric Blanchette est empreinte d'une grande finesse. Dans le choix des acteurs, dans le choix de la scénographe et dans ses choix de mise en scène. L'approche minimaliste frappe juste. L'histoire complexe est habilement mise en images par des choix judicieux: téléscopages, entrées et sorties des comédiens, répétitions dans le mouvement et le geste.

Pendant un moment, j'ai eu l'impression que c'est l'avenir qui criait après moi.
Elizabeth Law, interprétée par Paule Savard

Pour ce drame qui se construit par à-coups et demi-vérités, il fallait une distribution de haut vol. Et c'est le cas. Quelle magnifique distribution! Ils sont tous excellents. Normand D'Amour, taillé sur mesure pour cette pièce, offre deux superbes scènes. On ne le voit que deux fois, mais quelles performances! Il lance le spectacle et le ferme dans une magnifique scène meublée de silences et d'appréhensions. Il faut entendre les silences entre lui et Maxime Robin. Un doux moment.


Les personnages d'une très grande tendresse et vulnérabilité sont superbement interprétés par Véronique Côté, Christian Michaud, Paule Savard, Alice Pascual, David Laurin, Maxime Robin, Marco Poulin et Linda Sorgini.

La scénographie minimaliste de Marie-Renée Bourget Harvey séduit. Une pluie de cordages, symbolisant l'orage qui s'abat et qui prendra un tout autre sens au moment du déliement de la pièce, occupe tout le fond de la scène. Le sol d'une dorure réfléchissante symbolise les erreurs et les gestes qui se répètent non seulement dans le temps mais à chaque moment. Un mur de maison brinquebalant fait d'un amalgame hétéroclite de fenêtres souligne splendidement la mutance transgénérationnelle.

Des réflexions plein la tête
Une pièce qui suscite des réflexions comme peu le font. Sur soi. Sur le passage d'une génération à l'autre. Sur les relations père-fils. Sur les choix de vie. Une pièce à voir, ne serait-ce que pour mieux comprendre le monde dans lequel on vit.

Allez-y surtout si vous aimez: les pièces tire-larmes, les structures narratives surprenantes, les distributions mixtes Québec-Montréal, les scénographies de Marie-Renée Bourget Harvey.

Au Trident jusqu'au 10 février. Avec Véronique Côté, Normand D'Amour, David Laurin, Christian Michaux, Alice Pascual, Marco Poulin, Maxime Robin, Paule Savard et Linda Sorgini. Un texte d'Andrew Bovell. Une traduction et une mise en scène de Frédéric Blanchette.

Vous voulez en savoir plus? Écoutez notre interview avec Frédéric Blanchette ici (vers la cinquantième minute de l'émission du 15 janvier).

Bon théâtre et bonne danse!

vendredi 19 janvier 2018

Bleu.: combatif, haletant et moult couleurs

Bleu., un titre énigmatique ouvrant la porte à moult questionnements ou clefs de lecture. Un titre un peu trompeur aussi puisque le bleu n'est pas la seule couleur présente, chaque danseur ayant sa propre couleur. Retour sur un spectacle qui surprend et épate.

Une critique de Robert Boisclair

Crédit photo: Fabrizio Clemente
Bleu. se joue dans un corps à corps tour à tour pudique ou tendu, haletant ou belliqueux, de peau à peau, questionnant l’impact, l’ecchymose et tout ce qui remonte à la surface après les heurts. Une errance bleutée dans une plaine sombre, un paysage-cimetière austère et élégant qui, au fil de la gestion de la douleur, de sa mise en tension, laisse apparaître toute la fragilité, l’humanité de celui ou de celle qui la porte et qui continue d’avancer.

Un spectacle de l'intime
Le titre énigmatique fait référence à l'ecchymose, cette petite blessure bleutée qui apparaît au moment du choc entre la peau et un objet ou un autre corps. Petite blessure qui prend différentes teintes au fur et à mesure de la guérison. Bleu. c'est un peu ça. Les danseurs, joliment titré artiste chorégraphique dans le programme, ont différentes couleurs. L'un est rouge, l'autre jaune, l'autre bleu. La couleur bleu n'est qu'un état temporaire qui s'évapore doucement pour laisser place à une autre, puis une autre. Tout comme ce septuor de danseurs.

La chorégraphie s'inspire fortement de ce choc d'un objet avec un corps. Ici, il ne s'agit pas d'une chorégraphie à sept artistes mais de sept solos simultanés qui, occasionnellement, s'entrechoquent. Les corps se touchent un instant puis reprennent leur course. De ces chorégraphies qui se rencontrent peu, il se dégage une vision de l'intime. Une sorte d'entrée dans le corps, une découverte nouvelle des sensations.

Crédit photo: Fabrizio Clemente
Les courses folles côtoient, les gestes plus intimes, plus près de soi. La gestuelle est parfois saccadée ou au ralenti. Cela donne un mélange de pas de danse surprenant alors que les sept artistes ne sont que rarement au diapason. C'est sept spectacles en un seul.

Les danseurs occupent tout l'espace scénique, ce qui oblige le spectateur à faire des choix, à faire son propre spectacle. Il regarde tel danseur ou groupe de danseurs et pas tel autre. C'est une sorte de spectacle de l'intime pour le spectateur. Il y découvre ce qu'il veut bien, selon ses choix personnels.

Sombre écriture 
L'espace scénique est une vaste étendue blanche plongée dans un éclairage qui s'apparente à la pénombre. Point d'accessoires ou si peu. Les corps évoluent dans l'ombre, dans la pénombre ou sous un jet d'éclairage. Cela donne une ambiance propice à la poésie, à la réflexion. Encore une fois, un spectacle de l'intime.

L'énergie y est combative et haletante. Quelques moments de silence viennent briser ces élans énergiques. L'environnement sonore est à la fois baroque et fantomatiques. L'écriture chorégraphique est sombre. Il s'y dégage une certaine animalité. Une sorte de cri primaire du mouvement.

À découvrir
Un moment de retour en soi à la découverte de l'animalité du corps à voir.

Allez-y surtout si vous aimez: les atmosphères sombres, les spectacles sur la résilience, le travail d'Yvann Alexandre, les septuors.

À La Rotonde pour un dernier soir. Avec Steven Berg, Lucile Cartreau, Anthony Cazaux, Lucie Garault, Emma Mouton, Claire Pidoux et Marie Viennot. Une chorégraphie d'Yvann Alexandre avec la complicité des danseurs.

Bon théâtre et bonne danse!

jeudi 18 janvier 2018

Hôtel-Dieu: les portes du destin

Souffrance, deuil et rituels squattent Hôtel-Dieu, un spectacle en trois parties et deux actes. Si la souffrance et le deuil sont bien présents, la pièce n'en célèbre pas moins la vie, car derrière chaque porte du destin il y a une découverte, agréable ou douloureuse, qui transforme celui ou celle qui la franchit.

Une critique de Robert Boisclair

Crédit photo: David Mendoza
Après Changing Room, La Date et le NoShow, le collectif Nous Sommes ici revient avec un théâtre documentaire coup de poing. Ici toutefois, c'est de théâtre de spécialistes dont il est question;  théâtre de non-acteurs, le spectacle réunit sur scène des experts de leur domaine d’activité ou tout simplement de leur propre vécu (infirmière aux soins palliatifs, malades chroniques, survivants de la mort d’un proche, etc.)

Les souffrances et les deuils sont nombreux et variés: perte d'un enfant, maladie dégénérative, perte d'un être cher, deuil familial suite à un rejet, pour ne nommer que ceux-là. Et puis, il y a les rituels, petits ou grands sparadraps, qui permettent d'avancer et qui transforment. Hôtel-Dieu, c'est tout ça et bien plus.

La douleur de vivre
La pièce, scindée en deux actes et trois parties, met en scène des non-acteurs qui viennent raconter leur vécu. Le premier acte regroupe de véritables histoires de souffrances et deuils. Une tendre expérience où le spectateur découvre la douleur de vivre quand la maladie habite un corps ou que la mort guette.

Crédit photo: David Mendoza
Des non-acteurs habités d'une très grande franchise, touchants et drôles aussi, entre autres la magnifique résiliente Chantal Bonneville, s'offrent à un public qui ne peut que les admirer et les aimer. Il en faut du courage pour s'ouvrir à ce point devant un public d'inconnus. Chapeaux à ces êtres remarquables.

La mise en place semble parfois un peu forcée, la mise en bouche connaît quelques accrocs mais qu'est-ce qu'on s'en fout! Ces instants de sincérité valent de l'or. Ils sont thérapeutiques pour le spectateur. Sans doute aussi pour les protagonistes.

Célébrer la vie
La scène est quasi-dénudée est habitée par cinq portes en fond de scène, symboles de passages vers des destins imprévus. Autant de portes, autant de destins. Portes qui s'ouvrent sur une vie sombre mais aussi qui façonnent celui ou celle qui la franchit. Des portes qui en font des personnes différentes. Ni meilleurs, ni pires. Mais plus humaines. Plus sensibles. Plus empathiques. Plus aimantes.

Après la douleur de vivre du premier acte, il est temps de célébrer la vie. C'est ce que propose le deuxième acte. Des rituels pour se permettre d'avancer et de vivre. Pas pour oublier la perte ou l'être perdu mais pour lui donner un sens. Pour se permettre d'avancer.

Crédit photo: Daniel Ross
Ce deuxième acte se fait avec la complicité d'une trentaine de spectateurs invités à découvrir et partager les rituels. Une deuxième partie touchante à sa manière mais surtout festive. Une belle façon de célébrer la vie. Parce qu'une fois que la porte est franchie, malgré la douleur, malgré la perte, malgré la souffrance, malgré le deuil, il y a une vie à vivre, différente certes, mais une vie encore riche d'un apprentissage, de découvertes, d'amour, de bonheurs.

Thérapeutique
Cette pièce est thérapeutique. Pour le spectateur. De l'autre côté des portes, il y a nous qui découvrons huit magnifiques personnes et qui en sortons transformés.

Allez-y surtout: si vous avez le coeur solide, pour prendre goût à la vie, si vous aimez le théâtre interactif.

Une présentation du Périscope au Théâtre des Gros Becs jusqu'au 3 février. Avec Chantal Bonneville,
Jacynthe Drapeau, Ludovic Fouquet (2e et 3e semaine), Jasmin Hains, Louis-Olivier Pelletier, Guillaume Pepin, Ana Maria Pinto et Michèle Tousignant. Une mise en scène d'Alexandre Fecteau.

Vous voulez en savoir plus? Écoutez notre interview avec Alexandre Fecteau ici (au début de l'émission du 8 janvier).

Bon théâtre et bonne danse!

mardi 16 janvier 2018

La sélection du moment: Bleu.

La sélection du moment c’est une suggestion, une seule, d’un film ou d’un livre sur le théâtre ou la danse, d’un spectacle dansé ou théâtralisé ou encore d’un événement relié à un de ces deux arts que vous ne devez manquer sous aucun prétexte. Vous pouvez découvrir celle-ci en primeur lors de l'édition radiophonique chaque lundi.

Par Robert Boisclair

Crédit photo: Fabrizio Clemente
Bleu.
Un titre énigmatique ouvrant la porte à moult questionnements ou clefs de lecture. Un titre un peu trompeur aussi puisque le bleu n'est pas la seule couleur présente, chaque artiste ayant sa propre couleur. Bleu. c'est le «propos grave» d'un «chorégraphe inquiet, anxieux», comme le définit le chorégraphe Yvann Alexandre lui-même.

Bleu. c'est la fragilité intérieure portée par un septuor de danseurs à majorité féminine, cinq danseuses et deux danseurs. Si la fragilité intérieure est bien présente, le spectacle n'en est pas moins dépourvu d'une énergie à la fois combative et haletante.

Bleu. se joue dans un corps à corps tour à tour pudique ou tendu, haletant ou belliqueux, de peau à peau, questionnant l’impact, l’ecchymose et tout ce qui remonte à la surface après les heurts. Une errance bleutée dans une plaine sombre, un paysage-cimetière austère et élégant qui, au fil de la gestion de la douleur, de sa mise en tension, laisse apparaître toute la fragilité, l’humanité de celui ou de celle qui la porte et qui continue d’avancer.

Les 18 et 19 janvier à La Rotonde
Une chorégraphie de Yvann Alexandre avec la complicité des interprètes
Avec Steven Berg, Lucile Cartreau, Anthony Cazaux, Lucie Garault,
Emma Mouton, Claire Pidoux et Marie Viennot

Bon théâtre et bonne danse!

lundi 15 janvier 2018

Humour et drame

L'humour et le drame côtoient Les Enfants du paradis ce soir. En complément, le retour de notre Sélection du moment. Venez nous découvrir dès 17h 30 à l'antenne de CKRL.

Par Robert Boisclair

Premier bloc - 17h 30


Le metteur en scène et co-auteur Olivier Arteau ainsi que le comédien et également co-auteur Marc-Antoine Marceau occuperont les sièges des invités pour nous parler Made in Beautiful (La belle province), spectacle qui flirte avec l'improvisation, la performance alimentaire et le karaoké. Du théâtre qui s'annonce complètement déjanté.

Made in Beautiful (La belle province)
Premier acte
Du 23 janvier au 3 février
En savoir plus

Deuxième bloc - vers 17h 45


Soyez à l'écoute vers 17h 40 pour découvrir notre Sélection du moment. Cette semaine la danse est à l'honneur. Soyez des nôtres pour la découvrir mais si vous ne pouvez y être en direct, pointez-vous le nez sur ce blogue dès 6h00 demain pour la connaître.

Troisième bloc - vers 17h50

Crédit photo: Séquences, la revue du cinéma
David Lefebvre sera en studio pour nous offrir son commentaire critique de la pièce La mort d'un commis voyageur qu'a présentée la Salle Albert-Rousseau hier soir.

La mort d'un commis voyageur
Salle Albert-Rousseau

Quatrième bloc - vers 18h 10


Frédéric Blanchette, traducteur et metteur en scène, sera en conversation téléphonique pour nous parler du magnifique spectacle Quand la pluie s'arrêtera, un drame à la fois familial et environnementaliste.

Quand la pluie s'arrêtera
Trident
Du 16 janvier au 10 février
En savoir plus

Bon théâtre et bonne danse !

mardi 9 janvier 2018

La sélection du moment: La mort d'un commis voyageur

La sélection du moment c’est une suggestion, une seule, d’un film ou d’un livre sur le théâtre ou la danse, d’un spectacle dansé ou théâtralisé ou encore d’un événement relié à un de ces deux arts que vous ne devez manquer sous aucun prétexte. 

Par Robert Boisclair

Crédit photo: Séquences, la revue du cinéma
La mort d'un commis voyageur
Cette pièce mythique sur le grand mensonge états-unien du grand rêve de la fortune accessible à tous, brûlera les planches de la Salle Albert-Rousseau le 14 janvier. Portrait grinçant d'une société aux prises avec un mensonge impossible à réaliser, la pièce s'attarde également à une relation père-fils houleuse.

Lorsque le rêve américain tourne au cauchemar

Un sujet en or et une distribution de haut vol avec, entre autres, Marc Messier, Éric Bruneau, Robert Lalonde et Louise Turcot, font de ce spectacle, qui a connu un vif succès lors de sa présentation au Rideau Vert de Montréal cet automne, un événement à ne pas manquer à Québec.

Un texte d'Arthur Miller
Une mise en scène de Serge Denoncourt
Avec Marc Messier, Mikhail Ahooja, Marilyse Bourke, Éric Bruneau, Sarah Cloutier Labbé, Charles Alexandre Dubé, Aude Lachapelle, Robert Lalonde, Jean-Moïse Martin,
Mathieu Richard, Manuel Tadros et Louise Turcot

Bon théâtre et bonne danse!

lundi 8 janvier 2018

Retour radiophonique en compagnie de David Lefebvre

Grand retour des Enfants du paradis en version radiophonique ce soir en compagnie de David Lefebvre. Une édition 100% théâtre pour débuter la saison 2018.

Par Robert Boisclair

Premier bloc - 17h 30


Alexandre Fecteau, idéateur, auteur et metteur en scène d'Hôtel-Dieu, sera en studio pour parler de cette pièce de théâtre qui met en vedette des experts autour du thème de la souffrance et du deuil mais surtout de l'après-maladie et de l'après décès. La pièce tiendra l'affiche du Périscope.


Il n'y aura pas de Sélection du moment radiodiffusée cette semaine. Cependant vous pourrez la découvrir demain sur ce blogue. Alors, pointez-vous le nez ici dès 6h00 pour la connaître.

Deuxième bloc - vers 17h50


David Lefebvre recevra Maxime Beauregard-Martin, idéateur et auteur de Mme G., pièce qui tiendra l'affiche de La Bordée. Un regard touchant sur une figure marquante de l'histoire de Québec.

Toisième bloc - vers 18h05


En dernière partie de l'émission, David Lefebvre vous offrira sa sélection du moment des pièces à venir à Québec.

Bon théâtre et bonne danse !