vendredi 26 avril 2024

Aventure au pays de «soi» | Critique: Moi, Chiquita

  Une chouette fantaisie dansée qui questionne l'identité s'offre au jeune public des Gros Becs jusqu'au 5 mai.

Une critique de Robert Boisclair
Twitter: @Rob_Boisclair et @Enfantsparadis

Crédit photo: Elias Djemil Matassov

La pièce en quelques mots
Après avoir longtemps cru à son identité de princesse, Chiquita commence à s’y sentir à l’étroit. Avec fougue et sincérité, elle entame un voyage intérieur en se demandant ce que c’est «d’être soi-même» et comment oser l’être. Guidée par une liberté explosive et la voix réconfortante de son Abuela, Chiquita se transforme sur scène en nous plongeant dans ses pensées, ses batailles et ses moments de grâce.

Comment relier les différentes parties de soi-même alors qu’elles sont parfois radicalement contradictoires ou qu’elles proviennent de différentes cultures? Moi, Chiquita est un conte dansé à la fois poétique et philosophique. Grâce à un parfait alliage entre un texte épuré et une danse contemporaine évocatrice, ce spectacle nous fait réfléchir à nos identités multiples et à l’importance de les laisser exister.

Moi, Chiquita est un spectacle présenté au Gros Becs pour les 6 à 10 ans.

S'aimer pour sortir de l'ombre
Dans un décor épuré, composé essentiellement d'un immense rideau fait de bandelettes colorées, la fantaisie théâtro-dansée Moi, Chiquita s'ouvre sur une traversée de rideau. Chiquita, le personnage principal, se trouve derrière ce mur symbolisant sa vie avant la traversée vers un nouveau monde. Soudainement, l'action s'arrête et Chiquita traverse le rideau, symbole du passage vers un nouveau destin, pour se retrouver dans un nouvel environnement. Elle y est princesse. Mais très vite, le doute s'installe. La princesse d'hier, celle de l'ancien monde, est-elle la même princesse que celle de ce nouveau monde?

L'interrogation amène Chiquita à muer. Elle se cherche. Se transforme. Littéralement. Les habits de la princesse disparaissent peu à peu pour laisser place à de nouvelles fringues. Qui est-elle maintenant. Petit à petit, elle apprend à se découvrir. À s'aimer. S'aimer avec ses imperfections et ses habitudes, ses expressions, sa couleur de peau, sa langue. Elle apprend à s'aimer pour sortir de l'ombre et faire partie de ce nouveau monde. À sa façon. Et avec ses différences qui expriment profondément ce qu'elle est.

Cette mue physique, elle fait disparaître ses nombreuses couches de vêtements pour en faire apparaître d'autres, est une machine bien huilée. Il y a de l'humour et une forme de plaisir dans cette transformation. Il est bien là et déclenche les rires dans la jeune foule de spectateurs.


Gémellité culturelle
Dans cette scène occupée uniquement d'un immense rideau, d'un musicien et de l'actrice se dégage un fort sentiment de bonheur malgré les questionnements et l'étroitesse qu'elle ressent. La gémellité culturelle de Chiquita s'exprime par ses questionnements certes mais également par Abuela, la voix de sa grand-mère, qui provient de son passé pas si lointain. Elle lui montre le chemin. Chemin qu'elle suivra par la danse qui exprime ses états d'âmes. Ses craintes. Ses peurs.

Citladi Germé, Chiquita, est une gracieuse danseuse. Ses gestes sont incarnés. Il y a une douce et tendre physicalité qui incarne superbement ses pensées intimes et sa quête d'identité. C'est bien de cela qu'il est question ici. Cette identité qui nous travaille tous à divers degrés et pour différentes raisons. De cette danse viendra les réponses aux questions qui la tenaillent. Sa gémellité culturelle, de naissance espagnole elle est maintenant québécoise, n'est pas ce qui la différencie mais ce qui lui permet d'être partie prenante de cette nouvelle société, elle aussi en mutation.

Crédit photo: Elias Djemil Matassov

Traversée du rideau
Chiquita finira par traverser le rideau à rebours. Pas pour quitter le nouveau monde définitivement mais pour accepter et accueillir l'ancienne Chiquita, celle de sa vie d'avant, pour l'amener avec elle et la chérir dans son nouvel environnement. Elles ne font plus qu'une, différentes de ce qu'elles étaient individuellement mais une seule et même personne avec le meilleur de chacune de ses composantes. Cette transformation continuera, c'est Abuela qui le dit. Et c'est tant mieux. On ne reste jamais les mêmes. Que l'on change de monde ou pas. Ce dénouement est un des plus beaux moments de Moi, Chiquiata.

Un spectacle poétique et philosophique. Une aventure au pays de «soi». Un bel envol dansé que cette douce fantaisie qui questionne l'identité. Un lieu où tout se mêle mais se démêle dès que l'on a appris, ou accepter, à s'aimer tel que l'on est pour sortir de l'ombre et «être» tout simplement.

Amenez-y votre enfant surtout s'il aime: la danse, la musique, la fantaisie, les histoires drôles ou touchantes, les princesses et les grand-mères. 

Jusqu'au 5 mai aux Gros Becs. Avec Citladi Germé et Hugo Monroy. Une texte d'Andréanne Joubert. Une chorégraphie de Citali Germé.


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