jeudi 21 mars 2024

Baume au cœur | Critique: 176 pas

 Obtenir une libération de ses craintes à petits pas. C'est ce que propose 176 pas qui tient l'affiche des Gros Becs jusqu'au 28 mars.

Une critique de Robert Boisclair
Twitter: @Rob_Boisclair et @Enfantsparadis

Crédit photo: Théâtre de l'Œil

La pièce en quelques mots
Octave adore la musique et joue merveilleusement bien du piano, mais se sent si paralysé par la peur de l’inconnu qu’il ne sort presque jamais du somptueux domaine où il vit avec sa mère et sa tante Simone. Pour Delphine, c’est tout l’inverse : elle nage, pêche, explore et travaille pour ses parents poissonniers, quand elle ne se chamaille pas joyeusement avec ses quatre frères. À ses yeux, la vie est une aventure perpétuelle… sauf à l’école! Un jour, le chemin de Delphine croise celui d’Octave, et une improbable amitié nait entre eux. Delphine est-elle aussi téméraire qu’elle en a l’air? Quelle fracture dans l’histoire d’Octave lui fait craindre à ce point le monde extérieur ? Sauront-ils s’aider l’un l’autre à vivre enfin librement?

Dans un texte de Fanny Britt et sur une trame sonore d’Ariane Moffatt, cette création marionnettique met de l’avant les peurs qui nous habitent et la beauté qui peut en ressortir lorsqu’on les affronte. Cette création permet d’aborder les différents visages de l’anxiété et célèbre, d’abord et avant tout, le pouvoir transformateur de l’amitié.

Crédit photo: Théâtre de l'Œil
 
Parler à l'enfant en soi
176 pas est un spectacle pour les 7 à 12 ans d'abord et avant tout. Mais peut-être pas tant que ça. Fanny Britt, l'auteure, aurait dit après un enchaînement du spectacle au sujet des adultes présents dans la salle: «On sentait qu’il y avait beaucoup d’émotions d’anciens enfants». Il y a, effectivement, quelque chose qui vient chercher les adultes autant que les enfants dans ce petit bijou qu'est 176 pas.

Le désir de vaincre ses peurs et l'anxiété qui habitent chacun de nous et empêchent d'avancer, de découvrir, de vivre véritablement. De créer disait Fanny Britt dans un article de La Presse. Je dirais d'apprendre, de se libérer des objets rassurants, le piano pour Octave, à la fois boulet et bouée, et le courage apparent de Delphine qui cache une crainte profonde de la lecture, un monde où les lettres s'échappent et se mélangent pour former un tout incohérent pour s'offrir à la vie et à la découverte. La pièce parle à cet enfant enfoui en chacun de nous, avec ses traumas refoulés et la crainte d'oser affronter ses peurs. Un pas après l'autre. À petits pas. En 176 pas... qui sait?

Crédit photo: Théâtre de l'Œil

Deux patates qui s'éclatent
Si l'apprentissage du courage se décline en 176 pas, le parcours est parsemé d'une magnifique trame musicale, merci Ariane Moffatt, qui habille d'une douce aura le spectacle du début à la fin. Le piano, pièce maîtresse et centrale du spectacle, est l'objet de toutes les transformations. Il est l'objet de toutes les découvertes, ou presque. S'il est l'ancre vitale pour Octave, il est aussi le lieu où les transformations s'opèrent. Où Octave et Delphine se découvrent. S'apprécient. Se supportent mutuellement. Apprennent à se connaître. Si le piano est un boulet, il peut aussi être une bouée de sauvetage tant pour Octave que pour Delphine.

À l'image du piano, l'amitié naissante entre Octave et Delphine vogue entre le boulet et la bouée. Parions que cette amitié sera une bouée salvatrice pour nos deux héros sympathiques.  Sans jouer au divulgâcheur, disons que tout ça se terminera à l'occasion d'une dénouement où deux patates s'éclatent. 

Crédit photo: Théâtre de l'Œil

Des spectateurs séduits
Le public des 7 à 12 ans présents lorsque j'ai assisté au spectacle a littéralement été séduit. Les applaudissements et les gloussements de joie fusèrent dès que les lumières se sont éteintes. Il faut dire que les rires furent présents à quelques reprises et que le niveau d'écoute était élevé. Signes que le spectacle captait l'attention et suscitait la curiosité de ce public parfois rebelle.

Des marionnettes parfois surprenantes alors que celles représentant les adultes étaient immenses, proposait un jolie coffret de couleurs mais aussi d'émotions. On s'attache très rapidement aux marionnettes d'Octave et Delphine qui dépeignent merveilleusement bien la fragilité qui habite les personnages. Petits personnages de bois, de papier, de tissu et de fil que l'on aiment dès le début. On voudrait les prendre dans nos bras pour les supporter et les aimer. D'ailleurs les marionnettes réussissent des acrobaties qui ont fait bien sourire les jeunes spectateurs. Et, peut-être un peu les plus vieux également.

176 pas est un petit baume au cœur. Un immense sparadrap sur nos blessures d'enfant. Une immense lueur d'espoir pour des jeunes de 7 à 12 ans qui ont à affronter la vie et certaines peurs qu'ils imaginent insurmontables mais qui, au final, ne le sont pas si on décide de les affronter un pas à la fois. 

Allez-y, ou amenez-y votre enfant, surtout si vous aimez: les histoires qui finissent bien, retourner en enfance, offrir un espoir à votre enfant. 

Jusqu'au 28 mars aux Gros Becs. Avec Pierre-Louis Renaud, Audrey Perreault, Olena Khomyakova et Martin Vaillancourt. Une texte de Fanny Britt. Une mise en scène de Marie-Josée Bastien et Simon Boudreault.

Crédit photo: Théâtre de l'Œil

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