mercredi 23 mars 2022

La fin de la fiction: retrouver son sanctuaire

Rythme effréné, anachronismes et magie font de La fin de la fiction un petit bijou qu'il faut découvrir pour, qui sait, trouver son sanctuaire.

Une critique de Robert Boisclair
Twitter: @Rob_Boisclair et @Enfantsparadis


Synopsis (tiré du site web du Périscope)
Nuages en pantalon, compagnie de création bien connue de Québec, et le Théâtre Catapulte d’Ottawa portent un regard historique sur notre monde actuel où il est de plus en plus difficile de distinguer le réel de la fiction, alors qu’on baigne quotidiennement dans un monde numérique qui transforme la réalité. En adoptant la forme de l’essai, l’équipe de création aborde la nature fondamentale de l’humain — celle de croire — dans un spectacle empreint d’humour.

On parle de comment la fiction contamine le réel dans une dimension historique. On ne va pas raconter une histoire fictive, il n’y aura pas de personnage. On va passer à travers les moments de l’histoire qu’on veut connecter ensemble pour essayer d’éclairer notre présent.
Jean-Philippe Joubert dans une interview au quotidien le Soleil

Depuis l’invention de l’imprimerie jusqu’aux algorithmes numériques d’aujourd’hui, la diffusion de l’information s’est mélangée à la fiction. Mais qu’est-ce qui fait que nous adhérons plus facilement à une histoire inventée qu’à la complexité du réel? Et si c’était parce que la fiction est partout et s’infiltre insidieusement dans les sphères les plus intimes de nos vies? Dans une forme libre et ludique, La fin de la fiction explore l’interaction du vrai et du faux à travers une série d’épisodes qui nous font voyager dans le temps, depuis Gutenberg jusqu’à Mark Zuckerberg, en passant par Buffalo Bill et la magie de Disney, la contreculture des hippies et la Silicon Valley. 


Un sujet sérieux servi avec humour
A partir d’une scénographie toute simple mais efficace, trois cubes illuminés suspendus et un quatrièmement cube amovible cette fois en plein centre de la scène, La fin de la fiction propose un spectacle de fort calibre.  Sous une couche de vernis humoristique, l’équipage au volant aborde un sujet sérieux et important: la place envahissante de la fiction alors que la réalité en prend pour son rhume.

L’histoire démarre il y a 45 000 ans alors que l’homme des cavernes s’interroge sur son avenir, sa liberté et son libre choix.  Cet homme des cavernes reviendra à la toute fin pour, en quelque sorte, boucler la boucle. C’est le début d’une folle épopée jusqu’à nos jours ou les algorithmes semblent mener les humains par le bout du nez.


Rythme effréné, anachronismes et magie
Cette cavalcade au cœur de notre histoire est un véritable cabaret où humour et anachronismes côtoient les numéros de magie, oui, oui, celle des magiciens avec tour de cartes et femme coupée en deux, pour le plus grand plaisir de tous. Bien loin du fatras que peut laisser croire ce qui précède, tout s’imbrique merveilleusement bien pour amener le spectateur à réfléchir à l’envahissement de la fiction. Cette chimère qui transforme la réalité en histoires parfois abracadabrantes et fait disparaître les sanctuaires personnels dont nous avons tous tant besoin. 

Le spectacle change de forme à chaque chapitre, c’est un magnifique kaléidoscope de scènes qui nous font passer d’une époque à une autre de notre Histoire. L’enchaînement des saynètes de quelques-uns des moments de l’Histoire de l’humanité, passe en un clin d’œil. Jamais on ne s’ennuie pendant les deux heures cinquante que dure le spectacle. Chaque saynète est bien ficelée. Le rythme est vif et dynamique. Dans une de celles-ci, on s’amuse même directement avec le public. Un spectateur en particulier.


Une machine bien huilée
La machine est bien huilée. Tout roule à cent à l’heure. Et le moment vécu par le spectateur est magique, même si la première partie avant l’entracte souffre d’une longueur ou deux et que l’on se demande bien ou tout ça va nous amener. Le plaisir s'y pointe tout de même le nez dans cette première moitié de spectacle. La deuxième partie, plus vivante encore que la première, éclaire le spectateur dubitatif que j’étais à l’entracte.

Les protagonistes sont excellents. Ils interprètent tous plusieurs personnages, tous sexes confondus. Olivier Normand fait particulièrement montre d’une large palette de talents. Ses personnages sont tous très bien typés. Il est efficace à chacune de ses présences.


Allez-y surtout si vous aimezles spectacles fleuves et déjantés, les rebondissements et les effets surprises, la vision d’un avenir possible pour l’humanité, l’Histoire en version débridée.

Jusqu'au 9 avril au Périscope. Avec John Doucet, Carolanne Foucher, Marie-Hélène Lalande, Olivier Normand et Sarah Villeneuve-Desjardins. Un texte et un scénario de Carolanne Foucher, Jean-Philippe Joubert, Marie-Hélène Lalande, Danielle Le Saux-Farmer et Olivier Normand avec la collaboration au scénario de John Doucet et de Claudia Gendreau. Une mise en scène et une direction de la création de Jean-Philippe Joubert avec la collaboration de Marie-Hélène Lalande et de Caroline Martin.

Les Enfants du paradis est un blogue qui s'intéresse au théâtre, à la danse et au cirque de Québec. Vous y trouverez des critiques, des informations concernant les lancements de programmation ainsi que des nouvelles d'actualité. Un blogue à consulter régulièrement.

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